Connecteurs logiques & articulation des discours

Le besoin de logique est omniprésent dans toute communication, et soumet la langue, par exemple, à l’emploi des modes et des temps verbaux, ou à la syntaxe, pour exprimer ou comprendre de quoi il est question.

Ces besoins ne s’expriment cependant pas de la même façon selon l’objectif, ou type, du discours.

Rappel

On distingue cinq types de discours :

Ces différents types de discours se trouvent assez souvent mêlés sur un même support : dans un roman par exemple, le récit peut laisser place à une explication, ou à un dialogue présentant les arguments de deux personnages ; un plaidoyer d’avocat contient souvent le récit d’éléments biographiques de l’accusé, qui permettront d’expliquer son comportement ou d’en faire un portrait innocent ; les exemples ne manquent pas.

Outils logiques

Pour satisfaire aux différents besoins de logique qu’il induit, chaque type de discours présente des caractéristiques différentes dans l’organisation, l’emploi des modes et des temps ; il fait également appel à des outils linguistiques particuliers appelés connecteurs logiques.

Dans la mesure où leur utilisation est permanente, ces connecteurs (ou liens) logiques sont très nombreux, et parfois difficile à isoler : par exemple, la ponctuation peut servir de lien logique… il faut cependant être capable d’en identifier certains.

Tableau des connecteurs logiques pour le collège

(adapté de http://www.etudes-litteraires.com/liens-logiques.php)

Prépositions Conjonctions
de coordination
et adverbes
Conjonctions de
subordination
Verbes et
locutions verbales
CAUSALITÉ

Cause

à cause de
à la suite de
en raison de
grâce à
du fait de
car
en effet
parce que
puisque
comme
étant donné que
venir de
découler de
résulter de
provenir
CAUSALITÉ

Conséquence
ou but

au point de
de peur de
assez… pour
pour
afin de
en vue de
de là
d’où
donc
aussi
par conséquent
en conséquence
c’est pourquoi
ainsi
dès lors
pour que
afin que
si bien que
de façon que
de sorte que
dès lors que
tellement que
tant que
au point que
causer
impliquer
entraîner
provoquer
susciter
etc.
Addition outre
en plus de
en sus de
et
en plus
de plus
en outre
par ailleurs
ensuite
d’une part… / d’autre part
aussi
également
outre que
sans compter que
et
s’ajouter
marier
Concession
ou opposition
malgré
en dépit de
loin de
contre
au contraire de
au lieu de
mais
or
néanmoins
cependant
pourtant
toutefois
au contraire
inversement
en revanche
bien que
quoique
même si
alors que
tandis que
tout…que
quelque… que…
s’opposer à
contredire
avoir beau (+ infinitif)
réfuter
Hypothèse

condition

en cas de si
au cas où
pour le cas où
selon que
suivant que
à supposer que
etc.
Alternative ou
soit…
ou bien…
soit que…
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</tbody>
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Ecrivains

Travail oral proposé aux classes de quatrième et de troisième

But

Présentation d’un exposé oral de quelques minutes (3 à 5) sur un écrivain ou un auteur, donnant lieu à une évaluation – époques imposées :

Explication : il s’agit de travailler non pas sur tel ou tel écrivain dont on lit et dont on aime les ouvrages, mais de réaliser un travail sur un personnage de la littérature et de le placer dans une perspective historique et culturelle. En conséquence, un auteur d’ouvrages de jeunesse lu en 6e ou 5e, ou encore un auteur contemporain «à la mode», voire primé, et dont les livres se vendent comme des petits pains, n’ont pas forcément vocation à entrer dans ce tableau dans la mesure où ils ne permettent pas cette mise en perspective historique ; certains auteurs contemporains ont toutefois un «poids littéraire» considérable, qu’ils doivent non pas à leurs chiffres de vente, mais ce qu’ils ont pu apporter à la littérature elle-même ; on peut penser par exemple à Stephen King, auteur états-unien dont l’œuvre, bien qu’inachevée, a d’ores et déjà renouvelé, en la popularisant, la littérature fantastique ou d’horreur.

Contenu de l’exposé

Sans être imposée, une iconographie de l’écrivain (portrait seul, en famille, en groupe, représentations de personnages marquants, affiches de film tirés de l’œuvre, etc.) apportée sur papier ou mieux encore sur une clé USB (vidéoprojecteur) est bien évidemment recommandée.

L’évaluation tiendra compte de l’abondance, mais surtout de la qualité du contenu, ainsi que des qualités propres à une prestation orale : recours limité aux notes (autorisées), attitude, diction, etc.

Outils et moyens de recherche

La qualité  de la prestation orale dépend d’abord de la qualité du travail de recherche et de préparation. Celui-ci peut être mené à la maison ou au collège, en tirant parti des ressources du CDI, notamment pour les ouvrages de l’auteur ou les usuels spécialisés dans le domaine littéraire.

En dehors de ces ressources scolaires, Internet est évidemment un moyen privilégié de recherche d’information, avec les nombreux moteurs et encyclopédies disponibles ; il faut cependant rappeler et souligner que le travail à effectuer ne saurait se limiter au recopiage pur et simple d’un article d’encyclopédie : il faut trier, choisir et reformuler, c’est-à-dire s’approprier un savoir afin de le faire partager.

L’importance de la narration : littérature, cinéma, BD…

«Pour faire un bon film, il faut premièrement, une bonne histoire, deuxièmement, une bonne histoire, troisièmement, une bonne histoire.» Henri-Georges Clouzot

Ranger son bureau

D’arrivée récente dans la culture de l’humanité, le cinéma et la bande dessinée complètent la littérature pour former désormais une sorte de trinité de la narration. Bien sûr, le genre narratif n’est pas le seul en littérature, bien sûr il se trouvera un peu partout des esprits chagrins pour avancer que la position du cinéma est complexe, mais nous laisserons les critiques de tous poils à leurs querelles byzantines pour avancer tant bien que mal sur les chemins de la connaissance. Pour faire simple, nous dirons donc que littérature, cinéma et BD ont en commun de pouvoir être (et d’être essentiellement) utilisés pour raconter des histoires.

Dans cette perspective, ces trois arts partagent donc, entre autres, une problématique de la narration. Raconter une, ou plutôt des histoires, d’accord, mais comment ? Qui raconte ? Comment produire, au bénéfice du lecteur / spectateur, un récit cohérent ?

Choisir une histoire

Soit une histoire (presque au hasard) dont voici l’histoire, qui se murmure parfois entre lycée et université, mais que tout le monde sera capable d’apprécier : un grand cinéaste d’Hollywood, qui comme H.G. Clouzot, metteur en scène français du XXe siècle, connaissait l’importance d’une bonne histoire, rêve une nuit du scenario parfait, au point de s’en réveiller ! partagé entre la peur d’oublier l’histoire et celle de perdre en route ce rêve merveilleux, et encore tout ensommeillé, il griffonne quelques mots sur un bout de papier, et se rendort satisfait. L’histoire ne dit pas s’il retrouva son rêve, mais voici ce qu’il trouva écrit sur son papier à son réveil : «boy meets girl» (un garçon rencontre une fille).

Soit donc une histoire de rencontre, et plus si affinités ; histoire on ne peut plus banale et rebattue, mais justement : nous la connaissons tous, nous l’avons tous vécue ou vue jouer cent fois, nous en avons tous une idée : c’est donc un bon sujet. Nous voici avec des personnages et un début de trame narrative ; on peut y aller ?

Non. Comment ça, non ? Comme ça se prononce : non. Mais pourquoi ?

Compléter les ingrédients

Parce qu’une histoire, fut-elle d’amour, ne saurait se contenter de personnages et d’une idée ! Il faut aussi lui donner un cadre ; tenez, au hasard (enfin, pas tout à fait) : Adam et Ève, c’est la création du monde (selon la Bible et le Coran) et le paradis terrestre, un arbre, une pomme et un serpent ; Thésée et Ariane, c’est la Grèce ancienne, avec les dieux et les monstres ; Roméo et Juliette, c’est l’Italie du XVe siècle et une vendetta, Paul et Virginie une île déserte, etc. Pour que notre histoire puisse exister, il faut qu’elle soit rattachée d’une manière ou d’une autre à la grande histoire de l’humanité, il faut lui ajouter un lieu, une époque, en somme : un contexte.

Bon, alors mettons Paul et Virginie, ça fait plus moderne que Thésée et Juliette, et disons quelque part en France de nos jours, comme ça on est sûr de pas se lancer dans l’inconnu. Ça y est ? On peut s’y mettre ?

Non (tu ne sais pas pourquoi, lecteur, mais tu t’y attendais un peu, non ?)… Bon, qu’est-ce qui manque, ce coup-ci ?

Trouver un narrateur

C’est vrai, on a une idée, des personnages, un contexte… mais qui raconte ? Paul ? Virginie ? Un copain ? La grand-mère ? Personne ? Il nous faut un narrateur, un intermédiaire ; peu importe à ce stade de savoir ce qu’il est, mais on doit choisir, ne serait-ce que par qui on commence : on peut parfaitement imaginer que Virginie et Paul vont raconter l’histoire, chacun à son tour, et même que l’histoire vue par les yeux de Virginie ne soit pas tout à fait la même que celle vue par Paul (par exemple elle est raide amoureuse, il la trompe – ou l’inverse) ; on peut aussi décider que celui qui raconte l’histoire est une espèce de Dieu qui sait tout ce qui s’est passé avant et tout ce qui se passera ensuite… on peut décider ce qu’on veut, mais il faut décider quelque chose.

Vous ne voyez pas pourquoi ? Je vais essayer de vous expliquer.

Ajouter du sel et des épices

Si encore le narrateur était la seule chose à trouver ! On a pas encore fini de remplir la marmite de tout ce qu’il faut… Comment nos tourtereaux vont-ils se rencontrer ? Au collège : détournement de mineur(e) ! Au boulot : harcèlement ! Au bal : c’est d’un banal ! Tant qu’à faire, optons pour le banal de chez banal : à l’arrêt de bus ; Virginie attend le bus, c’est l’été, elle est ravissante ; Paul passe sur son scooter, et il est tellement ravi qu’il va brûler le stop qui se trouve juste après l’arrêt de bus et se faire renverser par une voiture (rassurez-vous, rien de grave, il survivra, et comme son scooter est bon pour la casse il va être obligé de prendre le bus lui aussi… vous me suivez ?). Passons à l’écriture ; comme on n’a pas encore choisi de narrateur, je vais vous proposer plusieurs solutions, on fera le tri plus tard.

Touiller

Solution 1 : narrateur extérieur et omniscient , avatar de l’auteur

Par une belle matinée de juin, où l’air embaumait et où les petits oiseaux chantaient, une jolie fille était, comme presque chaque matin, à l’arrêt de bus M*** R*** de la bonne ville de F*** . La journée s’annonçait radieuse, et Virginie (car c’était elle) avait troqué pour l’occasion son armure de jean et de pull informe pour une petite robe d’été dont elle avait justement fait l’emplette le samedi précédent et grâce à laquelle elle comptait rendre ses copines vertes de jalousie. Bien qu’elle eût raté un premier bus – car elle s’était attardée devant son miroir – elle patientait de bonne humeur, et l’anticipation de la tête que ferait Brenda, sa meilleure amie qui pesait 50 kg de plus qu’elle, à la voir dans sa nouvelle tenue, lui donnait des couleurs appétissantes.

Ainsi plongée dans ses pensées, elle fut tirée de sa rêverie par la pétarade d’un moteur de petite cylindrée, bientôt suivi d’un crissement de freins et d’un choc ; levant la tête, elle aperçut, au croisement situé à proximité de l’arrêt, un scooter gisant à terre au milieu d’une flaque d’huile, flanqué d’une automobile arrêtée, dont le conducteur, un gros homme d’allure apoplectique, était en train de descendre ; le pilote du scooter, apparemment indemne, trépignait en criant des choses incompréhensibles tout en désignant du doigt l’arrêt de bus. Virginie serait bien restée pour assister à la suite des événements, mais un bus arrivait : elle y monta, la scène de l’accident disparut presque instantanément de ses yeux et de son esprit, et elle se remit, souriante, à songer à la tête qu’allait faire Brenda.

Solution 2 : narrateur personnage (Paul) – point de vue interne – dialogue

etc.

A ce stade, j’imagine qu’on commence à entrevoir toute l’importance non seulement du choix du narrateur, mais également de celui de l’angle selon lequel une scène est vue, ou plutôt montrée. Clouzot a raison, une bonne histoire est indispensable ; reste à savoir comment on la raconte : c’est ce qui constitue une bonne partie des problématiques de la littérature, du cinéma, de la BD et même en partie du théâtre.

Étude de la langue : le subjonctif

Questions préalables

Dans certaines circonstances, nous avons besoin d’un mode particulier pour exprimer un sentiment, une pensée, une intention sans rapport direct au réel, à l’immédiat. Ce mode est appelé subjonctif.

Exposé

Le subjonctif est un des modes de conjugaison du français, qui en compte 5 : Impératif, Indicatif (+ conditionnel), Infinitif, Participe, Subjonctif.

Il est toujours employé dans des propositions subordonnées introduites par que – il est donc toujours conjugué sous la forme que + verbe :

que je mange, que vous mangiez…
qu’il prenne, que nous fassions, qu’on les pende, etc.

Attention :
le fait qu’une proposition soit introduite par que n’entraîne as de façon automatique l’usage du subjonctif : je suis sûr que tu viendras (indicatif futur) ≠ je voudrais que tu viennes (subjonctif).

Le mode subjonctif possède plusieurs temps :

Présent

Le subjonctif présent possède des terminaisons régulières :

Ces terminaisons sont celles du présent de l’indicatif, sauf pour les1ère et 2e personne du pluriel (P1 & P2) pour lesquelles la
terminaison du présent (-ons, -ez) est remplacée par celle de l’imparfait (-ions, iez).

Il se forme sur une base verbale variable selon le groupe d’appartenance du verbe.

Attention :

1. certains verbes sont irréguliers au subjonctif

2. précisions orthographiques : les verbes dont l’infinitif se termine par -ier, ainsi que ceux dont la base verbale se termine par -y, ajoutent un i à P1 et P2. ex. : plier : que nous pliions ; payer : que vous payiez.

Passé

Le subjonctif passé est un temps composé, formé de l’auxiliaire être ou avoir conjugué au subjonctif  présent et suivi du participe passé du verbe.

Il faut que je sois rentré pour sept heures.

Je voudrais que tu aies rangé ta chambre lorsque je rentrerai.

Les règles d’accord du participe passé avec les auxiliaires être et avoir s’appliquent au subjonctif…

De la lettre à la littérature épistolaire

Brève histoire

La lettre : tablettes de cire de l'époque romaineDepuis l’invention de l’écriture, entre le 5e et le 4e millénaire avant notre ère, la lettre est une forme privilégiée de communication. Phéniciens et égyptiens ont utilisé la transmission de messages écrits, et l’épître (du latin epistula, lettre) fut un des moyens utilisés par les premiers chrétiens pour organiser l’église. La lettre est même recensée dans des civilisations qui ne connaissaient pas l’écriture, comme dans l’empire inca, en amérique du sud, où les empereurs, avant la mortifère conquête espagnole, utilisaient des messagers transportant des messages codés à l’aide de nœuds sur des cordelettes, appelées quipus.

Durant des siècles, courriers et autres estafettes, puis postiers et facteurs, ont ainsi transporté et délivré des nouvelles à leurs destinataires ; mais la démocratisation progressive de la communication par lettre s’est vue soudain supplantée par des moyens plus rapides : d’abord le télégraphe, puis le téléphone, qui a rabaissé la lettre au rang de correspondance en permettant d’assurer une communication en temps réel entre deux ou plusieurs interlocuteurs.

Débordée par la technologie et par la vitesse, la correspondance n’a pourtant pas disparu, bien au contraire : de l’anecdotique carte postale aux textos et autres SMS, en passant par le courriel ou la communication via les réseaux de chat, notamment à travers MSN®, les moyens ont été multipliés ; mais le principe de base reste le même : convoyer un message au contenu plus ou moins fermé d’un expéditeur à un ou plusieurs destinataires.

Comment ça marche ?

Par lettre, par courriel ou texto, la correspondance n’est donc jamais qu’une variante de la communication, dans laquelle la particularité est la décomposition, en deux parties distinctes, de la situation d’énonciation (ou de communication : voir schéma).schéma de l'énonciation

Dans une conversation, qu’il s’agisse d’un dialogue en direct ou d’une conversation téléphonique, il n’y a pas de délai entre l’émission et la réception d’un message ; dans la correspondance, en revanche, ce délai, nécessaire à l’acheminement (quelle que soit la durée envisagée : quelques jours pour le courrier postal, quelques instants pour un texto) est certain : l’expéditeur doit également tenir compte du fait que le destinataire n’est pas obligatoirement là, en attente, au moment où le message est émis. De ce fait, la situation d’énonciation est coupée en deux : au moment de l’émission du message, le destinataire n’est pas là, et lors de sa réception c’est l’émetteur qui est absent. Une partie plus ou moins importante du contenu de la lettre va donc consister à « rétablir », de façon fictive mais acceptable, la situation d’énonciation décrite dans le schéma.

Lettre privée, lettre officielle, lettre publique.

Dans le cas le plus simple, celui de la lettre privée circulant entre deux personnes qui se connaissent déjà, ces éléments sont assez réduits : indication du lieu et de la date de rédaction, adresse au destinataire et signature permettent d’établir qui a écrit, quand, où, et de donner une indication du degré de familiarité ou du contenu de la lettre à travers l’adresse, qui est ici non pas les coordonnées postales, mais la façon de s’adresser au destinataire : Monsieur ou Madame, Cher(e) X., Mon chéri, etc. Dans le cas d’une lettre officielle avec un objectif commercial, administratif ou professionnel, il existe de nombreuses règles de présentation qui fixent la place, sur la lettre, d’un certain nombre de mentions obligatoires ou utiles : nom et adresse postale de l’expéditeur, du destinataire, motif ou forme particulière du courrier, références, formules de politesse consacrées précédant la signature complètent les éléments de la lettre privée. Quel que soit le type de lettre, y compris dans le cas d’une lettre ouverte destinée à être publiée (comme la fameuse lettre d’Emile Zola, au président de la République Française écrite à l’occasion de l’affaire Dreyfus et intitulée « J’accuse »), la lettre est, par définition, publique : son ouverture est en principe interdite pour le messager (même s’il est facile de le faire, comme il est possible d’intercepter courriels et textos), mais rien ne saurait empêcher l’expéditeur ou le destinataire de faire partager son contenu à qui bon leur semble ; la lettre est ainsi, chez Mme de sévigné par exemple, un moyen d’informer sa fille et l’entourage de celle-ci des nouvelles de Paris ou de Versailles au XVIIe siècle.

Usages de la lettre

Les moyens de communication dont nous disposons aujourd’hui,complétés par les progrès de l’alphabétisation, nous font souvent regarder la lettre comme un outil quelque peu archaïque ; elle l’est en effet, mais les applications des nouvelles technologies comme le courriel ou le texto, qui en sont les descendants, sont bien modernes… Il ne faudrait pas, au passage, oublier que la lettre a été, jusqu’à l’orée du XXe siècle, un moyen privilégié d’information pour des populations isolées, dans un pays ou les déplacements étaient longs et malaisés, la presse absente ou balbutiante, et la capacité de lire plus que limitée.

Information et témoignage

Ses usages, sans doute aussi anciens que l’écriture, sont attestés dès l’époque romaine, où les plus riches poussaient le raffinement jusqu’à avoir des esclaves capables de lire la lettre avec la même voix que leur correspondant ; puis, à travers la succession de toutes les époques plus ou moins troublées, les courriers et autres estafettes ont permis d’acheminer les dernières nouvelles des innombrables guerres et négociations diplomatiques. Outre les messagers humains, on a recherché sans cesse des moyens plus rapides et efficaces : après des expériences durant la révolution, Napoléon 1er mit en place en France le premier réseau de télégraphe, suivant l’invention de Chappe ; plus près de nous, les innombrables associations colombophiles du nord de la France sont une réminiscence des bataillons de pigeons voyageurs en usage pendant la première et jusqu’au début de la 2e guerre mondiale. Mais il ne s’agit là que d’outils pratiques ; un exemple célèbre de correspondance est celui que Madame de Sévigné, marquise à la cour de Louis XIV, a entretenu pendant des années avec sa fille Mme de Grignan, mariée à un noble provencal et vivant bien loin de sa mère et de Versailles. Ses lettres sont un exemple de la correspondance mondaine, et contiennent aussi bien des nouvelles de la cour que des informations précieuses sur le mode de vie de la noblesse de cette époque. Mais les correspondances ne s’arrêtent pas à quelques exemples connus : de très nombreux écrivains en ont entretenu de multiples, avec leurs éditeurs, leurs amis et collègues, leurs femmes ou leurs maîtresses, nous donnant ainsi des témoignages tant sur l’élaboration de leur œuvre que sur les modes de vie de leur temps. Plus près de nous, les lettres sont également une source privilégiée de témoignages sur la guerre : les lettres des « poilus » de 14-18 à leurs familles en sont un bon exemple.

Littérature épistolaire

A l’époque classique, la lettre était si répandue que certains écrivains ont eu l’idée de l’utiliser, sous la forme de lettres fictives (par opposition aux lettres réelles évoquées jusqu’ici) comme support même de leur œuvre : ainsi Montesquieu, à l’aube de l’époque des lumières au XVIIIe siècle, a-t-il critiqué la société de son temps à travers les Lettres persanes ; mais cette forme de littérature épistolaire s’étend également à des récits comme La nouvelle Héloïse de Jean-Jacques Rousseau ou Les liaisons dangereuses, de Choderlos de Laclos. Au XIXe siècle, cette forme littéraire est supplantée par d’autres, mais n’a cependant pas disparu aujourd’hui, comme en témoigne par exemple le succès d’Inconnu à cette adresse de K. Kressmann Taylor, une histoire d’amitié trahie et de vengeance à l’époque de la prise du pouvoir par les nazis en Allemagne où le récit épistolaire brille par son efficacité et sa finesse.

Lettres d’aujourd’hui

Au XXIe siècle, malgré son archaïsme apparent, la lettre se porte mieux que jamais : si nous l’avons remplacée par le téléphone pour communiquer avec la plupart de nos proches, nous recevons plus de courrier que jamais : factures, relevés de comptes, publicités ciblées, demandes en tous genres… et cela n’est rien à côté du volume de papier échangé par les entreprises ! Laissons de côté la poésie de la carte postale et les multiples occasions d’échanger des vœux ou des invitations : anniversaires, nouvel an, naissances, mariages, maladies, décès, qui donnent lieu à autant d’échanges de courrier parmi lesquels on rappellera l’usage, malheureusement presque perdu, de la lettre de château envoyée en remerciement d’une invitation, réussie ou non.

Mais les avancées technologiques sont venues compléter la lettre traditionnelle en attendant, peut-être, de la remplacer un jour : avec les débuts de l’ère numérique, le courrier électronique ou courriel est apparu, avec ses multiples possibilités et des modifications de forme somme toute très minimes par rapport à la lettre sur papier : même si ceux qui préfèrent écrire à la main sont nombreux, il est toujours possible de numériser une page manuscrite et de l’envoyer par les tuyaux de la toile mondiale… le cas du texto ou SMS, court message envoyé via les réseaux de téléphonie mobile, est un peu différent : si par sa facilité d’accès et son faible coût, il fait fureur parmi les jeunes générations, les limitations évidentes des supports sur lesquels il est généralement composé entraînent l’apparition d’un nouveau langage écrit, qui fait souvent hurler les puristes mais pose, de façon ponctuelle, des questions intéressantes sur l’écriture de la langue ; mais cela est une autre histoire, que nous traiterons peut-être « bi1to »…

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